Sulawesi : Tongkoko et Bunaken
Nous quittons l'île de Bornéo pour nous rendre sur l'île des Sulawesi, située à 300 km à l'est de Bornéo.
Une journée entière est nécessaire pour effectuer seulement quelques heures d'avion. En effet, toutes les routes des compagnies "low cost" passent par Jakarta et font des stops intermédiaires. Une autre façon de découvrir le pays : visiter et observer dans les salles d'attente des aéroports...
Nous voilà arrivés au nord de Sulawesi (aussi appelée les Célèbes), dans la ville de Manado.
Nous n'avons pas le temps de nous attarder en ville. Quelques discussions avec les pêcheurs de ce magnifique Marlin et surtout une dernière vérification de l'ordinateur d'Annabelle afin de contrôler son fonctionnement. Après la batterie de l'appareil photo qui a cramé sur le bateau, dans la réserve de Tanjung Puting, c'est à présent le PC qui semble hors service !
Nous n'avons pas d'autre option que de passer un jour et demi avec le service après vente d'Acer à Manado. Une manière de tester une fois encore que les procédures imposées par les sociétés sont délirantes, inutiles et chronophages face à la gentillesse de ceux qui sont obligés de les suivre pour ne pas perdre leur emploi. Au final, c'est sans appel ! Carte mère HS, pas d'autre moyen que de la changer à un prix supérieur à celui de l'ordinateur neuf. Nous refusons ce chantage, nous finirons l'expédition avec un seul ordinateur, sachant que nous avons tout bien sauvegardé au préalable. Enfin on l'espère !
L'objet de notre visite au nord Sulawesi est de rencontrer Mathilde, une française qui travaille avec son association Regards d'Ailleurs à l'éducation environnementale dans les villages voisins de la réserve Naturelle de Tongkoko.
Pour se rendre à Batu Putih au cœur de la forêt de Tongkoko et au bord de la mer, le trajet est assez rapide. Des bus collectifs puis un pick-up nous permettent d'arriver dans ce petit paradis sur terre.
Nous faisons rapidement la connaissance de Mathilde, la fondatrice de l'association, qui réalise les projets au Sulawesi. Mathilde est une jeune femme dynamique et chaleureuse. Elle est passionnée par l'idée de transmettre aux enfants le maximum d'informations pour qu'ils puissent mieux réaliser la richesse de l'environnement qui les entoure. L'association travaille notamment aux échanges entre plusieurs écoles dans le monde pour favoriser l'ouverture, le respect et la solidarité à l'échelle internationale.
Au Sulawesi, Mathilde travaille avec Ito, un jeune homme de Batu Putih. Il est guide de plongée pendant la haute saison touristique. Mais le reste de l'année il a beaucoup de disponibilités. Mathilde l'a choisi car il a témoigné au travers de son expérience et de son engagement, un intérêt infaillible pour l'environnement et une vraie envie d'agir pour le sauvegarder.
Tous les deux, ils réalisent des cessions de travail dans les écoles avoisinantes pour apprendre l'importance de respecter, protéger la nature mais aussi mieux la connaitre. Et si Mathilde est bilingue en indonésien, le soutien et l'expérience d'Ito ainsi qu'une certaine carrure permettent de capter l'attention des enfants à coup sûr !
Pour retrouver plus d'information sur Regards d'ailleurs, n'hésitez pas à consulter le site web en cliquant ici !
Mathilde travaille en étroite collaboration avec le Macaca Nigra Project. Il s'agit d'un partenariat entre l'institut de primatologie allemand, German Primate Centre - DPZ et deux universitées indonésiennes (Indonesian Bogor Agricultural University - IPB et University Sam Ratulangi - UNSRAT).
The Macaca Nigra Project vise à étudier l'écologie, la stratégie de reproduction et le système social d'une espèce de singe endémique de Sulawesi : Les macaques à crête noire ( Macaca Nigra).
Nous nous rendons dans la base scientifique dédiée au projet en ayant au préalable demandé l'autorisation à la responsable allemande du projet DPZ.
Nous y rencontrons Stephan le coordinateur local qui partage avec nous l'importance de mieux connaître et préserver ces espèces endémiques et emblématiques du nord de Sulawesi. Retrouvez plus d'informations sur le site de Macaca Nigra Project en cliquant ici.
Sur le terrain en compagnie de Samuel, notre guide local, nous croisons Mathilde et Jérôme, doctorant au sein du Macaca Nigra Projet, en plein travail d'observations.
En effet, un peu plus loin, nous rencontrons un premier individu qui semblerait presque nous saluer !
Les macaques à crête sont très particuliers. Leur pelage noir fait ressortir leurs yeux clairs. Ils sont également impressionnants par leur taille et leur dentition acérée.
La vie sociale comme chez de nombreux primates est prépondérante et organisée de façon structurée et hiérarchique. Bien que l'on retrouve des mâles dominants, les relations entres les différents membres du clan sont relativement tolérantes.
Ayant de nombreuses similitudes avec ses congénères macaques, le macaque à crête de Sulawesi possède aussi des particularités. D'un point de vue scientifique et pour mieux comprendre la grande théorie de l'évolution, l'étude de cette espèce est capitale. L'isolement né de l'éloignement de Sulawesi du bloc de Bornéo à conduit cette espèce à s'adapter. Il s'agit peut-être des singes les plus éloignés du grand continent et leur existence renferme encore de nombreux mystères !
La reproduction peut avoir lieu toute l'année. Lorsque les femelles sont en période de procréation (oestrus), leur zone périnéale gonfle. Il est difficile de ne pas les remarquer.
Les petits macaques à crête sont agiles et leurs expressions ne sont pas sans rappeler une part d'humanité !
La forêt de Tongkoko regorge de variétés d'espèces de faune et de flore.
Il ne faut pas hésiter à regarder en haut des cimes et parfois même entre les racines entrelacées des arbres.
Lorsque la nuit commence à tomber, on peut y voir un bien curieux animal nocturne.
Le tarsier est un des plus petits primates au monde. Il en existe plusieurs espèces. Il se caractérise notamment par une tête quasiment aussi grosse que le corps et d'énormes yeux qui lui permettent de voir dans le noir. Particulièrement rapide il est très difficile de l'observer si ce n'est à la sortie de son abri, au crépuscule, d'où il part s'alimenter.
Ayant eu la chance de réaliser une longue découverte de la forêt avec Samuel, nous avons pu également croiser un mammifère qui ressemble à un singe mais qui n'en est pas un. Il répond au doux nom de "Couscous".
Malheureusement, cet animal est aussi très braconné car sa viande est appréciée comme nourriture.
Au niveau macro, il y a aussi de quoi s'occuper et s'en mettre plein les yeux !
A la recherche des araignées nous sommes passés à "3 doigts" d'une belle tarentule !
La raison principale pour laquelle nous avions demandé à Samuel de nous accompagner, est qu'il est spécialiste et amoureux des oiseaux !
Et les oiseaux sont les plus difficiles à photographier, surtout sans le matériel adéquat.
Alors un "White Neck Mayna", "le Hair Crested Drongo", le "Brown Throated sunbird", vus sous cet angle ce n'est pas faire honneur à la beauté de ces animaux !
On ne parle pas de tous ceux que nous avons pu voir sans parvenir à obtenir un cliché parfaitement net : "Emerald Dove", "Sulawesi Cicadabird", "Red Knock Hawbill", "Green Imperial Pigeon", "Yellow bill Marcoa", "Purple Winged Roller", "Slender-Billed Cukoo-dove", "Sulawesi Babbler", "Black neck Monarch", etc.
Pour le Sulawesi Serpent-Eagle, l'image s'améliore un peu
Heureusement nous avons avec nous une botte secrète. Samuel, l'expert pour trouver et reconnaître les oiseaux.
Pour être efficace, il faut une vue et une ouïe exercées. Des yeux et des oreilles en alerte permanente.
Le plus de Samuel, il est vraiment pro : sur téléphone portable, il a enregistré le son de chaque oiseau de Sulawesi. Ainsi en entendant une espèce, Samuel peut rapidement reproduire le son de ce dernier, éveillant sa curiosité. La modernité en guise d'appeaux, ça c'est utile !
Le résultat ne se fait pas attendre. Nous obtenons quelques clichés de "martin-pêcheur" sublimes ! Ci-dessus, un "Lilac-Cheeked Kingfisher"
Un "Sulawesi Dwarf kingfisher"
Silencieuse et immobile, une superbe chouette : "OCHRE-Bellied Boobook", endémique d'Indonésie.
Ce fut donc une belle journée d'observations commencée à 6h00 sous la pluie. Nous n'avons pas cessé de découvrir de nouvelles choses. Arpenter la forêt de Tongkoko entourés d'experts et d'amoureux de la nature est un vrai bonheur que nous avons savouré très tard.
A la nuit bien tombée, nous étions encore avec un Samuel équipé d'une batterie de secours pour son téléphone et de 2 spots lumineux.
Nous croisons de nouveau une chouette toujours stoïque mais certainement plus enclin à chasser pour son diner !
Après ces quelques jours formidables passés du côté de Tongkoko, nous repartons la tête pleine de belles images et les jambes douloureuses des piqures de minuscules insectes. Un vrai supplice qui dure plusieurs jours !
Le passage par Manado est nécessaire pour se rendre au parc national marin de Bunaken qui se trouve juste en face.
Nous voilà partis pour 40 minutes de bateau qui se prolongent, compte tenu d'une avarie moteur.
L'île de Bunaken est accueillante. L'auberge dans laquelle nous nous trouvons à un beau jardin qui donne directement sur la mangrove.
On y croise un varan qui nous fait pressentir ce que pourraient être ceux de Komodos. Celui-ci est d'une taille et d'une dangerosité bien inférieures.
Il s'agit d'un lieu réputé pour la plongée du fait de tombants impressionnants et de la qualité de ses coraux colorés. On y retrouve d'ailleurs de nombreux touristes internationaux, venus pour découvrir ces richesses marines.
C'est vrai que les fonds sont beaux, on y retrouve de nombreuses espèces y compris des tortues, ce qui est toujours bon signe pour se faire une idée de l'état de conservation de la zone.
Nous sommes toujours à la recherche de nudibranches, animaux qui nous fascinent littéralement. Celui-ci ne semble pas bien content de nous voir !
Malheureusement, à la deuxième plongée c'est l'accident ! Julien se fait attaquer par un triggerfish (baliste en français) qui protège son nid.
Julien ne l’ayant pas vu roder, il s’est approché sans mégarde de la zone conique s’étendant du nid à la surface. Ce type de poisson bien que pas très gros (30 à 40 cm) est particulièrement hargneux lorsqu’il s’agit de défendre ses œufs. Il n’a pas hésité à heurter Julien, toutes dents en avant comme il le fait régulièrement pour casser le corail. Julien a réussi à se dégager de son rival sans toutefois avoir pu le voir une seule fois.
Au final, un bon saignement obligeant d’écourter la plongée de quelques minutes.
Notre temps sur Bunaken est compté. Nous décidons de tenter une troisième plongée de nuit car nous repartons le lendemain. Nous ne le regrettons pas car le spectacle nocturne est même supérieur à celui de jour !
La nuit, les crustacés sont en pleine activité. Ci-dessus, une magnifique crevette marbre !
Langouste, crevette nettoyeuse et plein d'autres très belles espèces, de crabes notamment.
Ainsi les volets de notre passage par le nord de Sulawesi se ferment. Probablement une zone du globe où nous serions heureux de retourner prochainement et visiter davantage.
Actions Biodiversité, au nord des Sulawesi du 19 avril au 1er mai 2011